Les Femmes D'Aubigné-Chapitre Cinquième

L'été avance pour les femmes d'Aubigné, pour nous il va bientôt commencer. J'ai hâte de revoir le soleil, les fleurs et les petites robes légères. Bonne lecture ! 

Chapitre Cinquième :

Madeleine Melchior, 5 Juillet 1889, La Chaumière Verte.

Cher Journal,

          Je n’y croyais plus. Jour après jour j’ai attendu et attendu impuissante, de plus en plus persuadée qu’on m’avait bernée, que jamais mariage il n’y aurait. C’est alors que Siméon s’est présenté chez le Maire en ce début d’après-midi. Il s’est excusé platement et a chaudement remercié mes deux amies pour avoir pris soin de moi à sa place. « Je n’ai pas reçu de coursive de votre aubergiste », m’a-t-il expliqué. Cet imbécile de Le Vallès aura donc cherché à nous nuire par tous les moyens possibles. Les larmes de soulagement ont coulé d’elles-même le long de mes joues. Il en a semblé gêné.

            Par la suite Siméon m’a emmené chez lui à la Chaumière Verte. J’ai quitté la Potière avec appréhension et je réalise maintenant que je n’ai pas soufflé un mot depuis notre départ. Aucun son ne veut sortir de ma bouche. Je suis complètement mutique. La maison est petite mais très fonctionnelle. Siméon m’a fait faire un rapide tour du propriétaire. Il m’a aussi expliqué que dès que nous aurions des enfants nous agrandirions l’espace. Il est menuisier principalement mais il a aussi l’habitude des constructions. Tant que nous ne serions pas mariés, je logerais donc sous les combles. Il y a aménagé un petit espace confortable pour moi avec un lit, une bassine et un petit fauteuil. Lorette m’a promis de venir dès demain matin, juste avant la cérémonie de mariage de Bathilde, avec Mathurin pour me remettre mes bagages qui sont restées à la ferme. Je tente de me détendre sans succès. Il faut juste que les mots viennent. J’ai aperçu un piano derrière l’escalier peut-être que jouer un air familier m’apaisera.

          Je suis enfin chez moi. Demain, Bathilde se marie. Je me dis que les jours heureux ne font que commencer.

Madeleine.

Bathilde Carron de la Morinet, 6 Juillet 1889, La Potière.

Cher Journal,

         Cette journée a sûrement été l’une des plus longues de toute mon existence faute d’en être la plus belle. La cérémonie a commencé à l’église aux alentours de dix heure. Des trombes d’eau menaçaient de réduire en poussière le toit de la pauvre église Saint Joseph, si bien qu’on entendait à peine les paroles du prêtre. Je n’y ai pas beaucoup prêté attention de toutes façons. Pardonnez-moi mon père, mais ce mariage n’a été qu’une suite interminable de tracas.

          Ma robe a été tâché, mes souliers pris dans la boue, une grande partie des invités d’Anatole n’ont pas pu se déplacer à cause des intempéries, même Lorette a failli rester coincée sur le petit chemin boisé entre sa ferme et le bourg. Heureusement il n’est rien arrivé à personne, je m’en serais voulue pour le reste de mon existence autrement. Lorsque nous sommes sortis de l’église, l’orage s’était calmé, une arche aux mille nuances empêchait le ciel de chuter. Nous sommes retournés à la Potière sans désagréments. Mais le repas fût une véritable course. Bénies soient Madeleine et Lorette qui se sont démenées à mes côtés. Je n’aurais jamais pu tenir toute seule.

            Hélas mes tourments ne sont pas encore terminés. Je me prépare bientôt à partager ma couche pour la première fois. Je suis dans une angoisse absolue. Ma mère m’a toujours dit qu’il fallait surtout fermer les yeux et serrer les dents. « Les hommes savent faire » éludait-elle pour mes autres questions. Bien entendu je ne doute pas qu’Anatole soit quelqu’un de très courtois. Je dois simplement calmer mes frayeurs et me résigner à devenir une femme.

            Sa femme.

          Le seul moment de répit de cette longue journée fut la toute première valse que j’ai partagée avec mon époux. Un instant béni. Les yeux d’Anatole se sont enfin posés sur les miens. Son regard franc, aux accents durs mais justes m’a fait réalisé que j’étais désormais une respectable femme mariée, épouse du maire. Un nouveau statut dont je me ferais un devoir d’être digne.

            Je ne sais lequel du Dieu ou de l’homme mettra un terme à cette journée, mais pour moi il est l’heure, car j’entends ses pas dans l’escalier.

Bathilde.

Madeleine Mechior, 7 Juillet 1889, Bourg. 

Cher Journal,

           Afin de mieux nous connaître et de profiter du soleil, Siméon et moi nous sommes baladés dans le village cet après-midi. Je retrouve petit à petit mon assurance. De prime abord mon compagnon paraissait renfrogné et peu commode mais finalement être à ses côtés est très amusant. Il m’a raconté beaucoup d’anecdotes sur la construction d’Aubigné toutes plus burlesques les unes que les autres. Comme la fois où son ami Jules, qui est charpentier, était resté pendu comme un cochon à l'une des poutres du salon de thé… Ce que j’ai pu rire !

            C’était une très belle journée.

        Si tous les jours à venir pouvaient être aussi beaux, je crois que je serais la plus heureuse des femmes. Je pense à Bathilde qui est aujourd’hui officiellement l’épouse du maire. J’aurais bien aimé la croiser en ville pour lui demander comment elle allait, la pauvre a connu tous les soucis possibles hier. Mais une fois la nuit de noces passée je suis certaine que cela va mieux. J’ai confiance, elle n’est pas du genre à se laisser submerger par ses émotions.


Commentaires

  1. Hé bien j'ai hâte de voir leurs futurs enfants à chacun des couples ! J'adore la génétique donc j'ai hâte de voir tout ça !

    RépondreSupprimer
  2. Oh oui ! Il me tarde aussi !! Mais j'ai encore et toujours des bugs de jeu, enfin promis ça arrive très très bientôt !

    RépondreSupprimer

Enregistrer un commentaire

Salut à toi ! Si tu veux poster quelque chose n'hésite pas, et s'il s'agit d'une critique s'il-te-plaît fait en sorte que celle-ci soit constructive.

Articles les plus consultés